Article mis à jour le 27/11/2012
Les éditions Tissot, spécialistes de documentation en droit du travail et Sysman, spécialisé dans le bien-être au travail et la prévention des risques psychosociaux se sont intéressés à l’impact du stress au travail chez les salariés ainsi qu’à la perception du phénomène par les responsables des fonctions RH.
Les résultats ont été obtenus en croisant les résultats :
- d’un sondage auprès des salariés réalisé par OpinionWay (mené du 24 octobre au 5 novembre 2012, auprès de 1002 salariés d’entreprises privées et publiques)
- et d’une étude (réalisée du 5 au 19 novembre 2012 auprès de 634 professionnels des ressources humaines du privé et du public).
Imbrication de la sphère personnelle dans la vie professionnelle
- 50% des salariés français reconnaissent reporter leur stress personnel dans la sphère professionnelle et considèrent que des évènements de leur vie privée influent sur leur stress au travail.
- Les difficultés financières dans la gestion du foyer et les contraintes de la vie familiale font partie des facteurs principaux qui agissent sur le stress au travail.
- Pour 46% des salariés c’est surtout la situation économique générale qui en est la cause.
- Pour 22% d’entre eux, ce stress est aussi lié aux relations avec le conjoint et aux transports en communs (25%).
- Du côté des DRH, la solution apportée est essentiellement l’écoute (67,4%) faute de solutions actives.
Le sociologue Ronan Chastellier considère que
« ce stress privé aurait des effets ultimes, il n’y a plus d’étanchéité ni de disjonction entre les deux sphères privée et professionnelle ».
Les facteurs déterminants du stress au travail
Les salariés invoquent des situations internes à l’entreprise comme facteurs principaux de stress.
- Pour 43% d’entre eux c’est la surcharge de travail qui est en cause tandis que pour certains, c’est la pression des résultats (29%) ou des clients (20%) qui prime.
- D’autres évoquent une difficulté dans les relations au travail :
- 41% la pression de la hiérarchie,
- 18% les relations avec les collègues,
- 16% le confort au travail,
- et 7% leur propre manque de compétences.
De leur côté, la direction et les DRH observent trois principaux symptômes liés au stress :
- pour 52,4% une détérioration du climat social,
- 47,6% une augmentation des conflits internes,
- et 45,9% un plus grand taux d’absentéisme.
Les DRH ressentent une augmentation du stress pour 69,10% d’entre eux, 33,5% estiment même que cette augmentation est significative ces trois dernières années. Pourtant près d’un tiers des salariés considèrent que ce sont les contraintes organisationnelles qui contribuent à les stresser. On constate donc une boucle destructrice : les symptômes viennent nourrir les causes.
Vers une valorisation sociale et monétaire du stress ?
- Pour 12% des salariés qui utilisent le stress comme moyen de pression auprès de leur direction, les revendications sont une révision des objectifs et une reconnaissance du travail.
- La majorité des dirigeants et DRH estiment que leur entreprise subit un impact financier lié au stress des salariés (5 à 10% de la masse salariale estiment 26% d’entre eux).
- Cependant ils avouent ne pas avoir établi de diagnostic formel de l’état de stress dans leur organisation dans 75,9% des cas.
Pour le sociologue, les DRH, qui sont au courant de ce fait (87,2 % ont été confrontés à des problèmes de stress des salariés), tempèrent malgré la forte pression médiatique autour du phénomène.
La perception du stress
- Pour 65% des salariés, le stress au travail est une mauvaise chose qui ne leur permettrait pas de se dépasser et leur ferait perdre leurs moyens.
- Même réponse du côté des DRH qui sont 95,7% à être d’accord avec le fait que le bien-être au travail contribue à la performance de l’organisation.
Pour le sociologue il y aurait une valorisation sociale du stress. Le stress « politiquement correct » qu’il serait prudent d’afficher dans l’entreprise « pour paraître ».
Des palliatifs au stress au travail
Esseulé dans la gestion de son stress, le salarié, n’ayant que peu de solutions proposées par ses dirigeants, décompresse par le grignotage (58% des femmes), le sport et les sorties (pour environ 1/3 d’entre eux).
Ne bénéficiant que d’une simple écoute de la part de ses dirigeants/RH, certains se réfugient plus dans le tabac (22%), l’alcool (19%), les médicaments (15%) voire les drogues (3%).
Etant peu désireux de mesurer l’état du stress (75,9% n’ont pas effectué de diagnostic réel au sein de leur entreprise), 70,8% des dirigeants et DRH déclarent qu’aucune formation à la gestion du stress n’est mise en place auprès des managers.
Ce que dit la loi
Au cours des douze derniers mois 87,2 % des dirigeants ont été confrontés à des problèmes de stress au travail dans leur organisation.
Le Code du travail prévoit que l’employeur a une obligation de sécurité de résultat. C’est à dire qu’il doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des salariés (art. L. 4121-1 et suiv.).
A la lecture de la jurisprudence, l’entreprise doit prendre la mesure des conséquences de sa politique de réduction des coûts, de surcharge de travail, de fixation d’objectifs inatteignables, en termes de facteurs de risque pour la santé de ses salariés. A défaut, les juges reconnaîtront une faute inexcusable de l’employeur en cas d’accident (Cour de cassation, 2e civ., 8 novembre 2012, n° 11-23855).